mardi 2 juin 2015

Chili : Mouvement de masse pour un enseignement gratuit

Un nouveau chapitre de la crise politique et morale du pays


Des centaines de milliers de manifestants, des jeunes mais aussi des travailleurs ou encore des personnes âgées, sont descendues dans les rues des grandes villes du Chili en exigeant que le gouvernement satisfasse aux revendications des étudiants. Les slogans comportaient notamment le suivant « La corruption ne doit pas décider de notre éducation ! ». Une des revendications centrales est la gratuité de l’enseignement et la fin de la logique de profit dans le secteur. Les professeurs des universités ont également rejoint le mouvement pour exiger un plan de carrière décent et la défense de l’enseignement public.

Ce mouvement a dores et déjà hélas causé la mort de deux jeunes, abattus à Valparaíso. À l'annonce de cette tragédie scandaleuse, de nouvelles marches ont aussitôt été déclenchées à travers tout le pays.

Article par Patricio Guzman, groupe Socialismo Revolucionario (section du CIO au Chili)


La présidente Mme Bachelet avait promis la gratuité de l’enseignement et la fin du profit dans l'enseignement, mais on n'en voit plus la moindre trace. Elle a même nommé ministre de l'Enseignement un certain Marcos Barraza, une personne qui est directement impliquée dans le scandale de la surfacturation de la rénovation de l’université Arcis (qui s’est d'ailleurs retrouvée au bord de la faillite). C’est se moquer des gens !

Les manifestants ont de plus exprimé toute la colère qui s’est accumulée contre la corruption de la caste politique capitaliste et des grandes entreprises. Les manifestants sont en colère contre les bas salaires, les mauvaises conditions de travail et les abus de toutes sortes. Ces marches géantes représentent la première réponse du mouvement social face au nouveau cabinet du gouvernement clairement néolibéral de Mme Bachelet.

Le nouveau ministre des Finances, bien-aimé des patrons, a notamment travaillé pour le FMI et pour diverses grandes banques américaines. Dès ses premiers instants, le nouveau gouvernement a suscité une grande méfiance de la part des travailleurs. La cote de popularité du gouvernement chilien est en chute libre, à peine plus d’un an après sa réélection triomphale, avec 62 % des voix. La présidente Michelle Bachelet se retrouve à présent au plus bas dans les sondages : seuls 31 % des Chiliens lui feraient confiance.

Après une longue période durant laquelle les dirigeants étudiants ont été paralysés par des pourparlers peu concluants, les étudiants ont à nouveau montré leur force dans la rue en défiant le gouvernement Bachelet et ses tentatives désespérées d'éviter les enquêtes autour de la corruption dans l'administration des impôts.

Marche monstre des étudiants du Chili

Marcher ne suffit pas !

Ces manifestations ont été une magnifique démonstration de force, mais marcher ne suffit pas. La Confech (Confédération des étudiants du Chili) et le mouvement étudiant ont gagné la légitimité et doivent maintenant s'apprêter à faire un pas en avant. Nous ne pouvons pas continuer à défiler des années durant, en vain. Nous devons forcer le gouvernement et la caste politique à accepter les revendications sociales par un appel concret à la désobéissance civile pacifique et massive, non seulement pour un enseignement gratuit et pour la fin de la logique de profit dans l’éducation, mais aussi pour la fin de toutes les institutions héritées de la dictature et consolidées par les divers gouvernements successifs depuis lors. Nous devons viser à mettre bas le modèle néolibéral et prédateur d’accumulation du capital et de concentration des richesses !

Nous pensons également qu’il est nécessaire d’unifier les luttes sociales à travers le pays. Isolés, nous ne pouvons pas gagner. Ensemble, notre force peut être imbattable. La Confech et les autres syndicats et organisations sociales qui ont montré leur volonté de combattre doivent convoquer une assemblée nationale des étudiants et des travailleurs. Cette assemblée devra prendre pour point de référence les revendications formulées par de larges couches de la population – pour la conquête de droits sociaux, contre la corruption politique et dans les grandes entreprises – et appeler à une journée de manifestation nationale et de grève générale de 24 heures.

Ce mouvement a ouvert un nouveau chapitre dans la crise politique et morale du pays qui frappe depuis huit mois tant le gouvernement et le monde politique que les entreprises. Plus d’un millier de travailleurs en grève à Brinks et à Prosegur avaient alors défilé dans les rues de Santiago, en lutte pour de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail. Mais ce n'était qu'un avant-gout de ce qui restait à venir avec les larges manifestations étudiantes. Les masses ont maintenant fait irruption sur l’arène publique.

Il est à présent de notre responsabilité d’approfondir cette crise pour ouvrir la voie à un résultat positif pour les masses : la convocation d’une nouvelle Assemblée constituante destinée à mettre fin à l’héritage de la dictature et des gouvernements civils néolibéraux. Cette assemblée sera l'une des étapes du processus de reconstruction des forces de la gauche révolutionnaire et socialiste.

Après la première année des projets de « réformes » ambigües du gouvernement Bachelet (qui n'étaient rien en comparaison des précédentes réformes du travail), après huit mois de scandales de corruption permanents (dont l’un impliquant directement la présidence), le soutien au gouvernement n'existe plus. Nous sommes entrés dans une nouvelle période. La crise générale de la légitimité du gouvernement reste à son point le plus haut et l’explosion de la jeunesse avec le mouvement de masse n’en est que la dernière expression.

Les camarades du CIO sont présents dans le mouvement
avec drapeau, tracts et journal

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