Malgré la victoire du Nigeria à la CAN : les problèmes fondamentaux sont toujours présents
La victoire bien méritée des Super Eagles |
La victoire du Nigeria lors
de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2013 en Afrique du Sud
prouve bien qu’il n’y a aucun problème avec la “personnalité nigériane”. De
manière générale, les Nigérians ont démontré leur excellence dans de nombreuses
sphères, malgré la faillite monumentale de leur élite dirigeante capitaliste et
cleptomane. La victoire des Super Eagles, l’équipe nationale nigériane,
représente un grand réconfort pour l’immense majorité des Nigérians, qui n’avait
jusque là rien pour réconcilier leur cœur avec leur pays, malgré ses immenses
ressources naturelles et humaines. Chaque jour, les Nigérians se réveillent
pour affronter le cauchemar socio-économique et l’atmosphère maussade qui règne
dans leur pays. La télévision, la radio et les journaux ne font que déverser
une litanie de nouvelles de corruption, d’attentats terroristes, de banditisme
et de violence ethno-religieuse, tout cela étant la conséquence de la mauvaise
gouvernance ; en plus de toutes les annonces des dernières attaques
néolibérales capitalistes sur les conditions de travail et de vie des
travailleurs, etc.
Article du Democratic Socialist Movement Nigeria, section nigériane du CIO
Article du Democratic Socialist Movement Nigeria, section nigériane du CIO
En vérité, la victoire des
Super Eagles est un triomphe de la volonté face à l’adversité engendrée
par la faillite du gouvernement. Le fait qu’il a fallu dix-neuf ans au
soi-disant géant de l’Afrique, avec sa population de 170 millions d’habitants,
pour remporter la Coupe des nations, démontre bien l’ampleur des problèmes qui
affligent le sport nigérian. Dans l’euphorie de la victoire, il ne faut pas
oublier ceci. Tout récemment encore, le Nigeria nous avait offert une si piètre
prestation aux Jeux olympiques de Londres 2012 que nos athlètes
étaient rentrés au pays sans la moindre médaille. Afin de pouvoir jouer les
matchs de qualification pour la CAN, les responsables du football nigérian
ont dû parcourir tout le pays avant de trouver un terrain de foot praticable ;
car le stade national d’Abuja, qui a couté une fortune de plusieurs millions de
dollars au pays afin d’y recevoir la Coupe du monde des minimes de 2009, a
déjà été entretemps envahi par des herbes géantes et des buissons.
La contribution cruciale de cinq
joueurs résidant au pays au succès des Super Eagles a révélé le potentiel
et le talent qui vivent parmi les joueurs qui n’ont malgré tout jamais pu aller
plus loin que leur championnat local. Mais il serait malvenu d’utiliser cet
argument afin de faire oublier la crise colossale qui sévit parmi la
Nigeria Premier League, qui est un des championnats les moins bien
organisés de toute l’Afrique. Alors que nous écrivions cet article à la fin
février, la saison 2012-13 n’avait toujours pas commencé au Nigeria, alors qu’elle
touche déjà à sa fin en Europe ! En outre, les joueurs sont mal payés et
ne reçoivent pas leurs salaires avant plus d’un an après avoir rejoint leur
club. La question du non-paiement des salaires des joueurs a même forcé les
joueurs des Sunshine Stars d’Akure (état d’Ondo) à partir en grève avant leur
match contre Al Ahly en Égypte l’année passée. Dans un pays immense mais
dépourvu du moindre véritable réseau de chemin de fer, les joueurs sont
contraints de se déplacer par la route, passant parfois plus de 24 heures
dans le bus juste avant un match.
Tout cela explique pourquoi les
joueurs nigérians qui ne parviennent pas à s’insérer dans un club européen, n’hésitent
cependant pas à rejoindre s’ils le peuvent un championnat moins “glamour” en
Russie ou Asie, où le salaire et les conditions sont tout de même bien
meilleurs qu’au pays. Certains d’entre eux, désespérés de pouvoir aller exposer
leurs talents ailleurs, se retrouvent impliqués dans de sordides histoires sous
l’emprise de managers véreux.
De même, il n’existe quasi
aucune politique de développement du sport à l’échelle locale. Le
sous-financement et les attaques capitalistes néolibérales sur l’enseignement
public ont mené à la multiplication de petites écoles privées dont la plupart ne
possèdent pas le moindre terrain de jeu ou de sport sur lesquels de nouveaux
talents pourraient se développer. Même dans les écoles publiques, ces
installations sont complètement dégradées. Voilà la raison pour laquelle les
écoles nigérianes ne produisent plus de sportifs talentueux comme dans le
passé.
Plutôt que d’investir dans le
développement du sport, les politiciens capitalistes préfèrent simplement
arroser les joueurs déjà victorieux de montagnes d’argent, puis attendre que le
hasard des circonstances leur amène une nouvelle victoire. Nous devons au
contraire investir des ressources publiques dans la construction et le
développement d’installations sportives aux niveaux national et régional, mais
aussi au niveau local dans les écoles et les quartiers, afin de révéler et développer
les talents. Sans cela, le Nigeria continuera à se trainer en bas de classement
et à attendre éternellement que la chance lui sourie à nouveau avant sa
prochaine victoire. Nous voulons cependant également ajouter qu’afin d’assurer
que de tels investissements atteignent réellement leurs buts et afin d’éviter
la corruption qui est si répandue dans le milieu du sport, toute cette
politique d’investissement sportif doit être placée sous le contrôle
démocratique des travailleurs, des joueurs, des professionnels et des habitants
des quartiers.
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