Le camarade Segun Sango, secrétaire général du DSM, lors du congrès |
Compte-rendu par notre camarade H.T. Soweto, président de la Campagne pour le droit à l'enseignement au Nigeria
Le 21ème congrès du
Mouvement socialiste démocratique (DSM, section nigériane du CIO)
qui s'est déroulé du samedi 5 au dimanche 6 octobre 2013
a été un grand succès tant sur le plan politique
qu'organisationnel. Environ 80 délégués et observateurs
représentant 17 sections dans tout le pays ont assisté au
congrès.
Le congrès s'est
déroulé dans un contexte de questionnement très large parmi la
population et de craintes répandues quant à ce que réserve
l'avenir pour la population rapidement croissante du Nigeria. Pendant
le congrès, la grève de l'ASUU (Union du personnel académique des
universités) donnait l'impression de pouvoir jouer le rôle d'une
étincelle permettant l'apparition de larges actions de solidarité,
ce qui aurait pu déclencher un nouveau puissant mouvement contre le
gouvernement Jonathan lui-même. Il était clair lors du congrès que
les membres et sympathisants du DSM allaient tout faire pour faire
passer à un niveau supérieur la campagne avec la désignation d'une
journée nationale pour sauver l'enseignement.
Tous les participants
au congrès étaient d'avis qu'une nouvelle période est en train de
s'ouvrir. Le DSM – section nigériane du Comité pour une
Internationale ouvrière – a été fondé lors de son premier
congrès en 1987. Cela fait plus de vingt ans, pendant
lesquels nous avons connu des période de succès comme des périodes
de défaites dans le cadre de notre construction des forces du
marxisme. Après avoir vécu ses dix premières années sous la
dictature, le DSM a parcouru un bon bout de chemin et a enduré
maints orages. Le congrès a été à plusieurs égards le moment de
dresser un bilan du travail de notre organisation depuis lors. Plus
de la moitié des participants au congrès étaient des jeunes, ce
qui montre le potentiel pour nous d'obtenir une croissance durable.
Certains de ces jeunes jouent déjà un rôle crucial dans différents
secteurs de notre travail. Beaucoup des personnes présentes
participaient aussi à un congrès pour la première fois, ce qui
montre que malgré les difficultés, nous sommes parvenus à
continuer à recruter.
Les camarades lors du congrès |
L'ambiance lors du
congrès était très conviviale et enthousiaste. La réunion des
étudiants qui s'est déroulée le vendredi – la veille du
congrès – a duré jusque tard dans la soirée. Lors de cette
réunion, les camarades étudiants ont débattu des grèves en cours
en ce moment dans le secteur de l'enseignement et des mots d'ordre et
méthodes qui sont nécessaires afin de construire la lutte jusqu'à
la victoire. La même chose s'est passée lors de la première
journée du congrès. La raison en est que, à cause des trop longs
intervalles entre deux réunions nationales en raison de
considérations financières, il y avait tellement de choses à
discuter en même temps. Malgré la fatigue à cause des très
longues heures passées assis sur une chaise, tout le monde a
participé de manière active tout au long du congrès, du début à
la fin.
Les points forts du
congrès ont été les discussions sur les perspectives du Nigeria,
les relations mondiales, la construction du Parti socialiste du
Nigeria (SPN), les rapports des différentes sections, l'élection
d'un nouveau Comité exécutif national (CEN) pour le DSM.
Plusieurs messages de solidarité ont été lus de la part des
sections du CIO en Europe, en Israël/Palestine et du monde entier.
Pour les camarades, ces messages de leurs frères et sœurs du monde
entier ont été une grande source d'encouragement afin de nous aider
à tenir bien haut notre drapeau. Cette solidarité internationale
était qui plus est matérialisée par la présence au congrès de
notre camarade Robert Bechert du Secrétariat international
du CIO, qui a introduit la discussion sur les évènements et
développements dans le monde entier, surtout vu l'impossible crise
du capitalisme mondial, la lutte des travailleurs et des jeunes
partout dans le monde, et les perspectives pour la révolution
socialiste. Nous avons également bénéficié de la présence du
camarade Dalaï, qui représentait le nouveau groupe sympathisant du
CIO en Côte d'Ivoire.
Le camarade Dalaï de Côte d'Ivoire |
Dans l'introduction à
la discussion sur les perspectives pour le Nigeria réalisée par le
camarade Segun Sango, secrétaire général du DSM, il a été
rappelé qu'à peine quelques jours avant de célébrer son
centenaire, le Nigeria est confronté à un avenir extrêmement
incertain, à moins que les masses laborieuses ne s'organisent pour
s'emparer du pouvoir politique. Tandis que la crise socio-économique
se poursuit toujours plus, entrainant dans son sillage une misère et
un chômage croissants malgré la croissance économique, les
conflits ethno-religieux et l'agitation en faveur du séparatisme
pointent à nouveau leurs laids visages. En réalité, au fur et à
mesure que se rapprochent la fête du centenaire et les élections
générales de 2015, la question nationale deviendra un problème
de plus en plus pressant, requérant une solution urgente, que la
bourgeoisie et le système capitaliste sont incapables d'apporter.
La question nationale de plus en plus pressante
Quelques jours avant
le congrès, le président Jonathan s'est dit en faveur de la
convocation d'une Conférence nationale. Mais il ne s'agit là que
d'une manœuvre de la part du gouvernement afin de détourner
l'attention des vrais problèmes qui sont le chômage, la misère, la
fermeture des universités et des hautes-écoles à cause des grèves
dans l'enseignement, etc. Toute conférence organisée par ce
gouvernement ne sera qu'un club de discussion à des fins de
diversion. Nous ne pouvons accorder la moindre confiance à aucune
section de l'élite capitaliste pour organiser une conférence
nationale qui serait véritablement souveraine et démocratique et
qui puisse garantir les intérêts de la classe des travailleurs, des
jeunes et des masses pauvres, ainsi que des divers groupes ethniques
et religieux du pays.
Nous autres,
véritables socialistes, sommes pour la convocation d'une Conférence
nationale souveraine démocratique, mais une conférence qui soit
convoquée par la population elle-même, via ses organisations de
masse, et à laquelle la vaste majorité des participants soient des
représentants élus de la population laborieuse pauvre, avec un
mandat afin de débattre de manière démocratique de l'avenir du
Nigeria et de savoir si oui ou non il faudrait que ce pays reste uni.
Les véritables socialistes sont pour l'unité du Nigeria, mais nous
pensons que cette unité ne peut être maintenue que par
l'unification des masses des Nigérians en soutien actif à un
gouvernement des travailleurs armé d'un programme socialiste ;
nous sommes qui plus est entièrement opposés à l'idée de vouloir
maintenir cette unité à tout prix et par la force. C'est pourquoi
nous nous battons pour le droit de toute nationalité et de tout
groupe ethnique à l'auto-détermination, jusqu'à l'indépendance
s'il le souhaite, tant que cette décision est le fruit d'un débat
démocratique parmi les travailleurs de cette région.
Beaucoup de camarades
se sont levés pour prendre la parole. Un des principaux points du
débat a été le rapport des camarades Dagga Tolar et
Chinedu Bosah sur les luttes des travailleurs et notre rôle et
intervention dans celles-ci. Dagga a récemment été élu président
de sa section de l'Union nigériane des enseignants dans le quartier
Ajeromi-Ifelodun de Lagos (un quartier populaire qui fait environ
trois fois la taille d'Adjamé). Il nous a fait part de la lutte
menée par les membres du DSM et par les militants enseignants pour
un syndicat démocratique, combatif, et qui tienne compte de ses
membres. Le camarade Chinedu (secrétaire à la publicité pour
la CDWR – Campagne pour les droits démocratiques et des
travailleurs) a raconté la lutte des travailleurs à bas salaire à
Durapack (une usine chinoise dont les travailleurs sont traités
comme des esclaves) et la campagne de la CDWR parmi ces travailleurs
précaires.
Le camarade Dagga Tolar |
Le congrès a
confirmé la nécessité urgente de construire le Parti socialiste
du Nigeria (SPN), surtout vu l'absence de tout effort
sérieux de la part du mouvement syndical de construire une
alternative politique de la classe des travailleurs. D'ailleurs, vu
les déclarations des dirigeants syndicaux au cours des derniers
mois, non seulement nous pouvons conclure qu'ils ont laissé tomber
toute idée de récupérer le Parti travailliste ; ils
semblent également avoir perdu toute confiance dans la capacité de
la classe des travailleurs à sauver le Nigeria du désastre. Ils ne
sont pas les seuls dans ce pessimisme : bien qu'elles soient
enrobés de belles phrases marxistes, les déclarations de la part
de la plupart des autres groupes de gauche trahissent le même
sentiment.
Malgré les difficultés, le SPN va de l'avant
Construire le SPN en
tant que parti politique large qui rassemble tous ceux qui désirent
se battre pour le changement au Nigeria et qui puisse apporter une
direction politique en ces temps de lutte tout en constituant une
alternative pro-travailleurs sur le plan électoral, est la meilleure
chose à faire pour aller de l'avant. Bien que certains groupes de
soi-disant “gauche” semblent se contenter d'attendre que la
situation change d'elle-même, il est de notre devoir à nous autres
marxistes de fournir un pont entre la période actuelle et la
suivante. Le SPN peut jouer ce rôle pour nous en ralliant toutes les
forces qui désirent le changement et en fournissant une opportunité,
surtout en période électorale, de mettre en avant un programme
socialiste alternatif afin de défier et remettre en question la
politique néolibérale des principaux partis capitalistes ; une
telle alternative pourrait bénéficier d'une formidable réception
dès que la situation objective commencera à évoluer.
D'excellentes
nouvelles ont été annoncées quant aux développements dans les
activités du SPN depuis la dernière réunion du Comité national du
DSM au mois de mars. Les délégués au congrès et autres membres
ont appris avec enthousiasme le fait que le parti est parvenu à
trouver un bureau à Abuja, sur le territoire de la capitale
fédérale, où pourra siéger le Secrétariat national du SPN ;
alors que nous avions jusque là cru impossible de parvenir à
satisfaire cette exigence cruciale (bien que fortement
antidémocratique) de la loi électorale. Nous avons aussi entendu
des rapports de tournées et activités à Abuja, au Nord-Ouest, au
Centre-Nord, au Sud-Sud et au Sud-Est, dont le but était de
construire le soutien pour le SPN, ce qui est également nécessaire
si nous voulons satisfaire aux exigences de la loi pour pouvoir faire
enregistrer notre parti. En fait, au moment du congrès, le SPN
pouvait compter sur des membres et sympathisants dans plus des
deux tiers des États qui composent la fédération du Nigeria,
tel que requis par la loi électorale. Ceci constitue un
développement extrêmement important, qui prouve que quels que
soient les obstacles qui se posent sur le chemin de l'émancipation
électorale des travailleurs, nous pourrons les surmonter avec
détermination.
Au stade où nous en
sommes, nous pouvons nous préparer en toute confiance pour
l'inscription du parti auprès de la Commission électorale nationale
indépendante. C'est pourquoi nous avons fixé la date du 16 novembre
pour le congrès de fondation du SPN, auquel le comité exécutif
national de ce parti sera élu, de sorte qu'en février 2014,
nous puissions présenter ce parti en tant que candidat pour les
élections de 2015. Afin de renforcer ce travail, nous avons
émis un appel financier pour assister le lancement du SPN. Les
camarades du DSM, avec les autres membres du SPN, porteront cet appel
auprès du mouvement large des travailleurs, en qui nous avons toute
confiance pour le financement d'un parti politique qui soit une
véritable alternative via le soutien des deux grands syndicats
et les nombreuses contributions indépendantes de travailleurs.
Les camarades lors du congrès |
Ci-dessous, nous
publions les liens vers les quatre résolutions (pour l'instant
en anglais) qui ont été discutées et adoptées à l'unanimité
lors du congrès. Ces résolutions donnent une analyse plus détaillée
de notre analyse concernant la situation au Nigeria, en Afrique et
dans le monde, la situation de la lutte de classes et de la lutte
pour une alternative socialiste.
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