Arrêtons le massacre par des actions de masse en Palestine, en Israël et dans le monde
Des familles entières brulées vives. Des parents tués avec leurs enfants. Le quartier Shajaiya de la ville de Gaza en ruines. Plus de 1100 Palestiniens ont trouvé la mort depuis le 8 juillet, sous le déluge de feu qui ne cesse de se déverser sur cette petite bande de terre assiégée, miséreuse et très densément peuplée. Habituellement, l'Eïd Al-Fitr est un jour de réjouissances marquant la fin du Ramadan. Mais cette année, le 28-29 juillet a surtout marqué une des offensives aériennes les plus mortelles depuis le début de cette guerre, au cours de laquelle une centaine de personnes ont à nouveau perdu la vie.
Compte-rendu et analyse de la situation en Israël-Palestine par notre camarade Shahar Benhorin de notre section du CIO en Israël-Palestine, Tnu`at Maavak
Sotzyalisti / Harakat Nidal Eshteraki (Mouvement de lutte socialiste)
Vu que l'âge moyen
des 1,8 millions d'habitants n'est que de 17 ans, un très
grand nombre de victimes des cruels bombardements israéliens sont
des enfants. La plupart des résidents tués n'avaient jamais
participé à un combat de leur vie. Il semble que 6000 personnes
aient été gravement blessées jusqu'ici, sans compter les dizaines
de milliers qui souffrent à présent de chocs psychologiques. De
nombreuses personnes ont également perdu leur maison. Plus de
100 000 personnes sont réfugiés.
La seule centrale
électrique du territoire a été endommagée – des dégâts
tels qu'on ne pourra pas la réparer avant l'année prochaine. Avant
la guerre, le courant provenant de cette centrale et celui acheté à
Israël permettait aux habitants d'avoir l'électricité chez eux
quelques heures tous les jours. Mais à présent, il n'y a plus ni
électricité, ni eau, ni système d'évacuation.
Personne ne peut être
nulle part à l'abri à Gaza, et il n'y a nulle part où aller.
Chaque nouvelle phase du conflit est encore plus brutale que la
précédente. Parmi les lieux qui
ont été bombardés, on retrouve l'école de l'Office de secours et
de travaux des Nations unies, l'hôpital de Waffa, des mosquées…
tout cela démontre encore une fois le cynisme de la propagande
israélienne, qui tente de présenter le meurtre de masse de la
population civile comme étant autant de “malheureux accidents”.
Certaines personnes ont été tuées par des “tirs d'avertissement”
envoyés sur ces bâtiments avant d'y balancer les missiles qui vont
les incendier. Ces méthodes “humanitaires” d'avertissement de la
population ne sont que des outils de propagande utilisés pour
camoufler la véritable nature de ce qui n'est rien d'autre que du
terrorisme d'État.
Les
mensonges répétés sans cesse par le gouvernement israélien, qui
parle d'une guerre “défensive”, du fait qu'il n'y a “pas le
choix”, contrastent fortement avec toute analyse à tête reposée
du rapport de force et de l'ensemble du contexte d'agression
systématique militaire et économique et de super-oppression de la
population de Gaza par Israël.
Cette
propagande est également réfutée par le fait que cette guerre a
fait relativement peu de victimes israéliennes. Trois civils en
Israël sont décédés de manière tragique. 53 soldats
israéliens sont morts, pour rien – ce seul bilan est à lui
seul déjà supérieur au nombre de personnes tuées par les tirs de
missiles et mortiers effectués par le Hamas et autres milices
palestiniennes depuis la Bande de Gaza sur les douze dernières
années.
Cependant, dans cette
guerre, le système de “Dôme de fer” mis en place par Israël
intercepte presque tous les missiles identifiés comme dangereux pour la vie des civils. Ce n'est pas pour rien que sur les
trois civils qui ont perdu leur vie en Israël, un seul a été
tué par un missile – il s'agissait d'ailleurs d'un Bédouin
du sud d'Israël qui, tout comme des dizaines de milliers de Bédouins
dans le Sud (une population arabe dont l'occupation traditionnelle
est l'élevage nomade dans le désert), ne bénéficiait d'aucune
protection, vu la politique raciste suivie par l'État israélien.
Cette personne vivait dans un campement, qui n'a pas le statut de
village officiellement reconnu, ce qui fait que les habitants n'ont
pas le droit d'y construire un abri anti-bombes. Ce village
n'apparait pas sur la carte, et donc le système “Dôme de fer”
se contente d'ignorer les missiles qui tombent sur la tête de ces
gens. Les autres personnes ont été tuées par des éclats de
mortier à portée courte – l'une de ces personnes étaient un
manœuvre immigré thaïlandais, forcé par son patron de poursuivre
le travail dans la plantation malgré les tirs.
Les pertes
israéliennes depuis que l'invasion terrestre a démarré le
18 juillet sont les plus grandes jamais subies lors d'une
offensive militaire sur la Bande de Gaza, y compris durant les
intifadas. Toutefois, cette fois-ci, cela ne s'est pas traduit en une
baisse soudaine du soutien à la guerre parmi le public juif
israélien, comme les autres fois, parce que la crainte des missiles
ou de la possibilité d'une attaque sur la population via les tunnels
construits par le Hamas de Gaza en Israël est telle qu'elle a donné
naissance à une véritable psychose nationale-chauvine.
Bien que les sondages
sont souvent manipulés et ne prennent généralement pas en compte
la population non juive (qui compte tout de même pour 25 %
de la population), il semblerait que parmi le public juif israélien,
une immense majorité de 85 % est opposée à tout cessez le feu
et se déclare en faveur de la poursuite de la guerre – cette
majorité s'étant accrue après le début de l'invasion terrestre.
Ce sentiment
réactionnaire a été induit par la crainte des missiles qui a été
exploitée par le gouvernement, mais aussi par le fait que bon nombre
d'entre eux ont l'idée qu'un cessez-le-feu à présent serait
prématuré et ne permettrait pas d'atteindre les objectifs promis
par le gouvernement en termes de sécurité, comme cela s'est produit
dans le passé. Mais la réalité est qu'après trois semaines
de guerre et de boucherie, le Hamas continue toujours à lancer ses
missiles sur Tel Aviv et sur d'autres villes israéliennes. Le
désespoir en pousse même certains à se dire que seul le massacre
de l'ensemble de la population de la Bande de Gaza garantira la
sécurité de la population israélienne, mais ce n'est qu'illusion,
et une fois de plus, il leur faudra déchanter.
Comment fonctionne le “Dôme de fer” d'Israël : un procédé de détection et d'interception des missiles provenant de Gaza |
Les soi-disant “pourparlers de paix”
Comment en est-on
arrivé là ? Neuf mois de négociations autant formelles
qu'inutiles entre Israël et l'OLP (Organisation de la libération de
la Palestine) se sont effondrés en avril, après une série de
provocations de la part du gouvernement Netnayahu. Toute cette
période de négociations n'avait en réalité pour autre but que de
cacher l'intensification des attaques sur les Palestiniens, y compris
le meurtre de 61 Palestiniens dans les territoires occupés, la
destruction de centaines de maisons de Palestiniens, et l'extension
des colonies juives en Cisjordanie et dans Jérusalem-Est.
Le siège de Gaza
s'est renforcé, violant l'accord de cessez-le-feu signé par Israël
à la fin de la dernière guerre, en novembre 2012, lorsque le
gouvernement Netanyahu s'était vu contraint malgré lui de relâcher
le siège, en laissant un peu plus d'espace à Gaza pour la pêche et
l'agriculture. Au lieu de ça, l'armée israélienne a tiré à balle
réelles sur les pêcheurs palestiniens qui se trouvaient “trop
près” de la frontière. Pendant ce temps, les dirigeants
palestiniens du Hamas (le parti islamiste au pouvoir à Gaza) et du
Fatah (le parti bourgeois de Mahmud Abbas qui dirige la
Cisjordanie) se voyaient poussés à entamer de longues négociations
en vue d'établir un gouvernement de coalition pour une Autorité
palestinienne unifiée, afin de mettre un terme (du moins
formellement) à la division entre la Cisjordanie et la Bande de
Gaza, qui ont à présent chacune leur popre Autorité palestinienne.
Les dirigeants
israéliens ont tout fait pour chasser le Hamas de cette coalition et
l'empêcher de participer aux élections. À cause de ça, le
gouvernement israélien s'est retrouvé fortement isolé parmi la
“communauté internationale”, allant jusqu'à perdre le soutien
de ses partenaires américains. Le 30 avril, pour la première
fois depuis le cessez-le-feu de 2012, Israël a assassiné un
militant du Hamas dans la Bande de Gaza (un commandant de milice). À
ce moment-là, on voyait fortement diminuer le nombre de projectiles
tirés depuis Gaza, après une série de tirs fournis en mars
organisés par l'organisation du “Djihad islamique” après
que trois de ses combattants aient été tués par Israël. En mai,
seuls quatre missiles ont été tirés. Le 11 juin, une
tentative d'assassinat par Israël d'un officier de police du Hamas a
causé la mort d'un garçon âgé de sept ans, décédé de ses
blessures quelques jours après l'attaque.
Le lendemain, trois
jeunes israéliens ont disparu en Cisjordanie. On a retrouvé un peu
plus tard leurs corps, abattus par un petit groupe terroriste, que
Netanyahu et ses amis se sont empressés de désigner comme étant
liés au Hamas. Néanmoins, un porte-parole de la police israélienne
avouait il y a quelques jours que la position de la police est que ce
meurtre n'avait sans doute été ni planifié, ni ordonné par le
Hamas. Cela n'a pas empêché Netanyahu d'utiliser la situation pour
affirmer que le Hamas était responsable et allait « devoir
payer », allant jusqu'à cacher pendant un moment aux yeux du
public israélien le fait que les jeunes avaient déjà été
retrouvés morts afin de manipuler les émotions de la population.
Il a donc ordonné un
raid sur la Cisjordanie, d'une brutalité telle qu'on n'en avait plus
vue depuis des années, avec le meurtre de plusieurs manifestants et
l'arrestation de centaines de militants palestiniens accusés d'être
membres du Hamas – y compris plusieurs députés de l'Autorité
palestinienne. Parmi les personnes arrêtées figuraient aussi
50 anciens prisonniers, qui avaient été libérés en 2011
dans le cadre d'un accord pour récupérer le soldat israélien
Shalit, et qui n'ont rien à voir avec cette affaire-ci. Lorsque les
corps ont finalement été retrouvés, Netanyahu et son entourage ont
hurlé « Vengeance », ce qui a à nouveau enflammé les
tensions nationales. Des bandes racistes, dirigées par des éléments
néofascistes (dits “kahanistes”), ont attaqué des travailleurs
et passants arabes et palestiniens. Un jeune palestinien a été
enlevé dans Jérusalem-Est, et a été battu jusqu'au sang avant
d'être brulé vif.
Des
manifestations et émeutes de Palestiniens se sont déclenchées à
Jérusalem-Est et en Israël, tandis que les différentes milices à
Gaza ont repris les tirs de missiles. Le bras armé du Hamas, les
brigades Izz al-Din al-Qassam, se sont elles aussi
impliquées. Le gouvernement Netanyahu, qui est à l'origine de
l'escalade de la violence, a relâché son contrôle sur les
évènements. Cette guerre à Gaza est avant tout un conflit destiné
à relever l'aura du régime israélien et le prestige de son
gouvernement, en se donnant l'air de répliquer et de venger les
jeunes Israéliens, tout en gagnant du temps en faisant semblant
d'avoir trouvé une solution au problème de la sécurité de la
population israélienne.
Des militants d'extrême-droite juive attaquent les manifestants pour la paix en criant « Mort aux Arabes ! » |
Un désespoir tragique
En réalité, la
stratégie sécuritaire de droite est un échec sur toute la ligne.
La politique de siège et les différentes offensives militaires
sanglantes sur la Bande de Gaza qui étaient censées mettre à bas
le Hamas n'ont en réalité fait que renforcer son pouvoir ainsi que
celui des autres milices, qui possèdent aujourd'hui des missiles
encore plus avancés. Ces attaques ont semé le désespoir, la
désolation la mort et la destruction, et ce faisant, n'ont fait
qu'encourager le sentiment de vengeance qui pousse à accomplir des
actes terroristes à l'encontre des citoyens israéliens.
Amira Hass, une
des rares journalistes israéliennes à avoir conservé son
honnêteté, qui a vécu pendant des décennies dans les territoires
occupés, décrit ainsi la trajectoire de crise suivie par le régime
israélien : « Ceux qui ont rejeté la proposition de paix
conclue avec le Fatah et Yasser Arafat, qui prévoyait la
création de deux États côte à côte, ont maintenu reçu
Haniyeh, le Hamas et les campagnes de boycott, désinvestissement et
sanctions. Ces mêmes personnes, qui ont transformé Gaza en un
immense camp d'internement destiné à punir 1,8 millions
d'êtres humains, ne devraient être surprise de voir ces personnes
creuser des tunnels pour tenter de s'évader. Ces personnes qui ont
semé l'étouffement, le siège et l'isolation, récoltent des tirs
de missiles. Ceux qui depuis 47 ans traversent la Ligne verte
impunément, exproprient les terrains de la population et nuisent
sans arrêt à la population par leurs raids, leurs fusillades et
leurs colonies – n'ont aucun droit de verser des larmes de
crocodile en parlant du terrorisme perpétré par les Palestininens
contre les civils » (21 juilet, Haaretz).
À présent, comme
Netanyahu lui-même l'admet à contre-cœur, le régime israélien ne
cherche même plus à renverser le Hamas dans la Bande de Gaza
sur le court terme, parce qu'il n'est pas certain de quelles forces
pourraient survenir à sa place. Déjà, on commence à voir à Gaza
certains groupes apparemment liées au Da`esh (État islamique en
Iraq et au Levant). Pendant que le ministre des Affaires étrangères
israélien, Avigdor Lieberman, appelle à la prise en charge
militaire complète de Gaza (ce qui contredit le discours qu'il
tenait dans le passé, en faveur du « désengagement
complet »), le cabinet de sécurité du gouvernement israélien
a défini le but de cette guerre comme suit : « Enraciner
une stabilité sécuritaire et une tranquillité sur le long terme
dans l'arène palestinienne, pour aller vers la stabilisation sociale
et économique avec le Hamas en tant qu'entité responsable,
affaiblie militairement, confinée à Gaza et chargée d'y maintenir
l'ordre ».
L'attaque actuelle
sur Gaza démontre également à quel point la situation s'est
détériorée dans la région depuis les spectaculaires émeutes
populaires du “Printemps arabe” de 2011. Lorsque le
précédent gouvernement Netanyahu avait lancé la dernière guerre
sur Gaza en 2012, il n'avait pas osé aller plus loin qu'une
semaine, ni déclencher une offensive terrestre. Quelques jours plus
tard, les ministres des Affaires étrangères de Tunisie et d'Égypte
étaient déjà partis en visite à Gaza, et le gouvernement
israélien craignait à la fois la remise en question de la paix avec
l'Égypte et la propagande parmi les Palestiniens. Mais à présent,
vu la solidarité arrogante et criminelle donnée à Israël par le
nouveau président égyptien al-Sissi, qui est même allé jusqu'à
justifier la position d'Israël, vu aussi le soutien explicite de la
part de puissances internationales, Israël a une bien plus grande
marge pour perpétrer ses actes de barbarie. Il semble que la guerre
actuelle sera encore plus longue et encore plus meurtrière que le
massacre horrible de 2008-9.
Les souffrances des habitants de Gaza sont sans nom |
Problèmes sociaux et économiques
La guerre semble
également être utilisée par ce gouvernement pour détourner
l'attention de la population de la crise sociale et des problèmes
économiques qui s'aggravent en Israël elle-même. Alors qu'on voit
une sérieuse baisse de la croissance de l'économie israélienne, le
gouvernement est en ce moment, en pleine guerre, en train d'effectuer
toute une série d'attaques contre sa propre population dont
d'importants plans de privatisations.
Cependant, le régime
se dirige rapidement vers une crise majeure à la sortie de la
guerre. On le voit déjà avec des sorties publiques entre ministres
d'un mordant sans précédent, surtout en pleine guerre, où chacun
cherche à renvoyer à quelqu'un d'autre la responsabilité pour
l'immense crise qui se fait plus vive de jours en jours. Malgré le
fanfaronnage autour de la destruction de 20 tunnels du Hamas à
Gaza, que le gouvernement cherche à présenter comme étant une
preuve de victoire stratégique, il y a très peu de chances qu'ils
parviennent à s'en sortir la tête haute. Après de nouveaux tirs de
missiles vers le centre d'Israël, qui ont forcé de nombreuses
compagnies aériennes à annuler leurs vols vers le pays, des
combattants palestiniens ont à nouveau traversé la frontière via
un tunnel, le lundi 28 juillet, pour abattre cinq soldats
israéliens. Aucun des problèmes fondamentaux n'a disparu.
Le gouvernement
israélien a beau gesticuler en exigeant la démilitarisation de
Gaza, la fin des missiles et des tunnels, il est très peu probable
que le Hamas accepte. Cette revendication de démilitarisation
unilatérale signifierait que l'État d'Israël conserverait
l'ensemble de ses moyens d'agression militaire envers les
Palestiniens. Quand bien même le Hamas ferait mine d'accepter de
rendre les armes de manière formelle, il n'y a aucune chance qu'ils
rendent toutes les armes.
Le Hamas n'a toujours
pas concédé grand-chose aux demandes d'Israël. Il était en
sérieuse perte de popularité avant la guerre, mais à présent, il
est parvenu à rassembler un large soutien en tant que force de
“protection”. Les tentatives du dirigeant du Hamas Khaled Mash`al
de jouer un rôle de dirigeant national, mettant de côté les
divisions religieuses et sectaires, ont quelques similarités à la
rhétorique de Hassan Nasrallah, le dirigeant du Hezbollah,
pendant la guerre entre Israël et le Liban en 2006. À présent,
le gouvernement israélien fait face à une situation dans laquelle
la collaboration d'al-Sissi a fait perdre à l'Égypte son statut de
partenaire de négociation fiable aux yeux du Hamas. Les dirigeants
israéliens insistent sur la “proposition égyptienne” (peut-être
avec une influence saoudienne), qui a été définie sans
l'approbation du Hamas, parce qu'ils veulent éviter toute
implication de la Turquie et du Qatar dans les négociations de paix,
vu que ces pays soutiennent le Hamas.
Bien que les
principales revendications avancées par le Hamas et par le Djihad
islamique soient dirigées contre le siège de Gaza organisé par
Israël et l'Égypte et contre les agressions israéliennes, le
gouvernement Netanyahu ne peut se permettre d'accepter la moindre
d'entre elle, parce que cela porterait un grand coup à son prestige
et risquerait de le faire paraitre comme étant le perdant sur le
plan politique, malgré l'engagement d'une force militaire massive.
C'est ce qui a poussé le gouvernement à rejeter les appels de Obama
et du Conseil de sécurité des Nations-Unies à un cessez-le-feu
immédiat – cela ne peut qu'approfondir l'isolement du régime
israélien sur la scène internationale.
Miliciens palestiniens prêts à tirer leurs missiles sur la population israélienne |
Le mouvement antiguerre
Après cette guerre,
les critiques et la contestation à l'encontre d'Israël vont
certainement redoubler, et l'ampleur des manifestations de solidarité
avec Gaza partout dans le monde confirme cette perspective. Un autre
facteur d'inquiétude pour le gouvernement israélien et ses
partenaires internationaux est la crainte que se produise une vague
de radicalisation parmi les communautés palestiniennes de
Cisjordanie, de Jérusalem-Est et au sein d'Israël.
À la suite du
massacre du quartier Shajaiya dans la ville de Gaza, au cours duquel
plus de cent personnes ont été tuées, une grève
d'opposition à la guerre a été organisée le lundi 21 juillet
par les syndicats des travailleurs palestiniens en Cisjordanie et par
le Comité suprême de la communauté arabo-palestinienne en Israël.
Vu le manque de soutien de la part des syndicats – le
principal syndicat israélien Histadrut a scandaleusement décidé de
soutenir la guerre
(http://www.histadrut.org.il/index.php?page_id=3223),
cette grève n'a pas eu un caractère proprement ouvrier, mais on a
également vu de nombreuses petites entreprises, boutiques, ateliers,
etc. fermer, et même certaines agences locales des banques
israéliennes, dont les gérants craignaient de rompre la grève.
Le jeudi 24 juillet,
des dizaines de milliers de gens ont manifesté en Cisjordanie.
On voit ainsi petit à petit émerger la véritable force capable
d'empêcher la réaction furieuse et la folie du massacre : la
lutte de masse, que le Hamas et le Fatah évitent depuis des années
à tout prix et de manière très consciente par tous leurs plans qui
ne mènent qu'à l'impasse. Bien qu'il ne s'agisse pas encore d'une
insurrection de masse, les manifestations étaient organisées
partout en Cisjordanie. La plus grande marche s'est déroulée du
camp de réfugié de Al-Am`ari, près de Ramallah, vers le poste de
contrôle de Qalandiya. 20 000 personnes y étaient
présentes. Ce n'était pas la plus grande manifestation
palestinienne contre l'attaque sur Gaza, mais c'était une des plus
grandes manifestations jamais vues en Cisjordanie depuis des années
(voir cette vidéo http://www.youtube.com/watch?v=7RP0_66GTuI).
Les manifestants ont
repris des appels à la solidarité avec les résidents de Gaza, et
ont marché héroïquement sous une lourde répression militaire. Une
barricade de pneus enflammés a été érigée pour bloquer l'attaque
de l'armée, des feux d'artifice ont été tirés, et plusieurs
jeunes ont balancé des pierres et des cocktails Molotov contre les
soldats. À Bethlehem, des véhicules et des containers à ordure ont
été utilisés pour dresser des barricades. Des milliers de gens
sont descendus à Naplouse. Une manifestation très militante a aussi
eu lieu devant la colonie de Bet-El près de Ramallah.
Neuf manifestants ont
été tués par l'armée israélienne, et un autre par un colon, qui
tentaient de les disperser. Cela montre la nécessité et
l'importance de faire passer la lutte au stade supérieur en
organisant des comités populaires démocratiques de type agora, afin
de mobiliser et de coordonner les actions et manifestations et
d'assurer leur protection – y compris par les armes, mais sous
contrôle démocratique.
En Israël même, on
a vu des manifestations rassemblant des milliers de Palestiniens à
Nazareth, à Kfar Kana et à Umm Al-Fahem, malgré
l'arrestation de centaines de Palestiniens israéliens et de
résidents de Jérusalem-Est en juillet. Tout cela coïncide avec la
manifestation antiguerre qui a rassemblé 6000 personnes le
samedi 26 juillet dans le centre de Tel-Aviv, dont la plupart
des participants étaient juifs ; il s'agit jusqu'ici de la plus
grande manifestation antiguerre en Israël. Des milliers de personnes
étaient présentes malgré le fait que les actions précédentes
étaient plus petites et étaient attaquées par des “patriotes”
juifs d'extrême-droite (qui s'en sont entre autre pris à nos
camarades du Mouvement de lutte socialiste). Ces gens sont venus
aussi malgré le fait que cette manifestation n'était soutenue par
aucun parti politique de l'establishment israélien, même pas par le
parti Meretz (“Énergie”, un parti nationaliste libéral de
“gauche”, qui a soutenu la guerre mais appelle maintenant à un
cessez-le-feu). Et malgré le fait que la police ait annoncé à la
radio et à la télé une heure avant l'évènement qu'il avait été
annulé, avant de finalement décider de l'autoriser à nouveau.
Certains manifestants
ont été battus à la fin de l'action, et le même jour,
deux Palestiniens ont été tabassés et presque lynchés à
Jérusalem par l'extrême-droite. Mais ces milliers de gens ont
certainement pu donner confiance à d'autres milliers de gens dans le
fait qu'il est possible de s'opposer à la guerre, ce qui présage du
bon pour l'avenir du mouvement. Dans ce sens, l'action du 26 juillet
peut être considérée comme un point tournant.
Manifestation pour la paix à Tel-Aviv : “Continuons à résister à l'occupation” “Protéger ne veut pas dire tuer les enfants” |
Vers un État palestinien
Le Mouvement de lutte
socialiste, section du CIO en Israël-Palestine, est en pleine
solidarité avec le peuple palestinien contre les agresssions
brutales et barbares d'Israël mais aussi avec la population
israélienne qui souffre également des conséquences de la guerre.
Derrière le sentiment chauvin arrogant qui vit en ce moment parmi la
majorité des travailleurs israéliens, se cache l'envie de parvenir
à des solutions fondamentales. Netanyahu démontre chaque jour de
manière un peu plus flagrante qu'en réalité il est contre toute
idée d'un État palestinien indépendant à côté d'Israël.
Les
couches de la classe dirigeante israélienne qu'il représente ne
considèrent pas qu'il soit dans leur intérêt de voir l'émergence
d'un État palestinien indépendant et vivable. Ces capitalistes
– ainsi que beaucoup de membres de la classe dirigeante
américaine – craignent qu'un État palestinien ne les
aiderait pas à résoudre le conflit national et la situation dans la
région, mais au contraire, que cet État serait contrôlé par des
forces politiques imprévisibles de leur point de vue et renforcé
militairement, et se mettrait à revendiquer des territoires et des
ressources, ce qui constituerait par conséquent un facteur
d'instabilité et de radicalisation majeur dans la région, englobant
par dessus le marché les communautés de Palestiniens vivant en
Israël et dans la diaspora.
Netanyaha a récemment
déclaré que : « Nous n'accepterons jamais le moindre
accord qui nous contraindrait à abandonner le contrôle de la
sécurité sur le territoire à l'ouest du fleuve Jourdain ».
Ce manque flagrant de volonté politique de la part du régime
israélien, qui refuse de concéder la moindre forme d'État
indépendant, joue clairement un rôle dans la perpétuation de ce
conflit sanglant. Les travailleurs juifs israéliens vont finalement
tirer la conclusion que tant qu'ils se rangent du côté de leurs
propres exploiteurs et oppresseurs contre les Palestiniens, ils
n'obtiendront jamais la moindre sécurité, paix ni justice sociale.
La tâche des forces
socialistes est d'expliquer sans relâche et de manière cohérente
la nécessité pour les travailleurs israéliens de lutter pour les
enjeux économiques du moment mais tout en soutenant les droits des
Palestiniens, car c'est là la première étape vers une paix
équitable, avec la fin du siège, de l'occupation, des colonies et
de toute forme d'oppression des Palestiniens ; la fin aussi de
tous les privilèges nationaux et discriminations envers n'importe
quel groupe, et l'application dans la pratique du droit égal à
l'auto-détermination. Cela signifie la mise sur pied d'un véritable
État palestinien indépendant, égalitaire, démocratique et
socialiste, à côté d'un Israël socialiste et démocratique, avec
deux capitales à Jérusalem et des droits équitables pour les
minorités, tout cela dans le cadre de la lutte pour un Moyen-Orient
socialiste.
Lutter ensemble contre l'élite capitaliste israélienne, instaurer la fraternité socialiste |
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