L'unité des
travailleurs est nécessaire pour défendre nos droits et nos
conditions de vie
Plusieurs
événements récents ont fait resurgir la question du racisme en
Nouvelle-Zélande. Dans un cas, une députée du Danemark, membre du Parti du
peuple danois (populiste de droite) qui visitait le pays a fait la
une des journaux avec un commentaire raciste au sujet de la cérémonie
d'accueil traditionnelle qui lui a été organisée par les Maoris.
Jared Phillips,
CIO – Nouvelle-Zélande
De même, on vient de
nommer Commissaire aux relations inter-raciales Susan Devoy, une
personne qui ne se soucie pas du tout des problèmes des Maoris (la
nation autochtone du pays, de race “noire” océanienne, qui constitue aujourd'hui à
peine 15 % de la population par rapport à la population
allochtone, ou “Pakeha”, issue principalement de la colonisation
européenne, donc “blanche”).
Au même moment, le
premier ministre du Parti national, John Key, a
chercher à susciter parmi la population la crainte de voir des
navires remplis de réfugiés d'Asie du Sud débarquer en
Nouvelle-Zélande, alors qu'on ne voit toujours aucun de ces navires
à l'horizon.
Enfin, on a vu un
groupe de néo-nazis organiser une marche de la “fierté blanche”
à Christchurch, la troisième plus grande ville du pays
(400 000 habitants).
Tous ces événements varient en
importance, mais pris tous ensemble, ils ont créé une controverse
croissante et de plus en plus de discussions dans la société autour
des questions d'ethnicité et de racisme.
Les “patriotes” blancs néo-zélandais d'extrême-droite |
La nomination de la nouvelle Commissaire
La nomination de
Susan Devoy, ancienne championne de squash, au poste de
Commissaire aux relations inter-raciales est perçu par beaucoup de
gens comme une provocation de la droite. Avant sa nomination, Devoy
était une conservatrice ouvertement déclarée. Face aux critiques
qui la jugeaient absolument non-qualifiée pour ce poste, Devoy a
répondu qu'elle “apprend vite” et qu'elle dispose d'une “bonne
boussole morale”. Parmi ses prises de position de droite, Devoy a
en particulier critiqué le port de la burqa et blâmé les Maoris
qui soulevaient des questions politiques importantes telle que le
jour de Waitangi.
Le jour de Waitangi
est une fête nationale qui commémore l'anniversaire de la signature
du traité de Waitangi, en 1840. Depuis des décennies, la fête
de Waitangi est utilisé par les Maoris en tant que journée
d'organisation de débats et de manifestations pacifiques et
symboliques afin d'attirer l'attention sur les problèmes que
connaissent les Maoris.
Bien que ce traité
n'était en réalité rien de plus qu'un outil pour l'annexion de la
Nouvelle-Zélande par l'Empire britannique, il contenait de
nombreuses promesses pour les Maoris, y compris le droit à avoir
leur propre gouvernement via la chefferie traditionnelle. Comme
beaucoup des promesses faites dans le traité n'ont toujours pas été
mises en application aujourd'hui, les Maoris considèrent le jour de
Waitangi comme un symbole de leur résistance. Les Maoris exigent que
ces points du traité soient respectés.
Le point de vue de
Devoy est que le jour de Waitangi ne devrait pas être utilisé par
les Maoris pour leurs “magouilles politiques”. La vérité est
malheureusement que c'est justement cette attitude – le refus
de reconnaitre de profondes injustices historiques – qui a
porté Devoy en tant que candidate idéale à ce poste aux yeux du
gouvernement.
Manifestation du jour de Waitangi : « Respectez le traité » |
Même certains parmi
la presse conservatrices estiment qu'avec sa nomination, la droite a
été un peu trop loin ; un éditorial commentait le fait que :
« Elle est extrêmement naïve sur le plan politique et sans
doute aussi sur le plan culturel… ce qui ne va pas vraiment avec un
poste dont le détenteur est censé servir de médiateur dans le
cadre d'affaires complexes touchant à la discrimination raciale et
aux droits de l'homme ».
Devoy ne répond à
aucune demande d'interview. Cela en arrive parfois à des situations
comiques. Un jour, une équipe de journalistes qui demandait à la
voir a été reçue par son associé qui disait qu'elle était en
train de dormir et qu'il ne fallait pas la réveiller. Juste au
moment où les journalistes ont vu la même dame passer en voiture
derrière eux.
Même lorsqu'on a
réussi à lui poser la question, Devoy a déclaré ne pas voir en
quoi la marche pour la “fierté blanche” à Christchurch méritait
le moindre commentaire de sa part. Lorsqu'une députée nationaliste
du Danemark, qui visitait la Nouvelle-Zélande et y a été
officiellement reçue suivant la tradition maorie, a décrit cet
accueil en ces termes : « J'ai trouvé ça vraiment
grotesque, ridicule, de voir un homme à moitié à poil, dans une
jupe faite en brins de paille, qui me tirait la langue en criant »,
Devoy n'a pas non plus jugé bon de faire le moindre commentaire.
Il a aussi été
révélé dans un magazine que l'autobiographie de Devoy, parue
en 1993, contient des passages où elle se plaint d'avoir eu du
mal à trouver des contrats sportifs bien payés en Afrique du Sud,
du temps de l'apartheid. Elle y dresse une liste de facteurs “pour”
et “contre” afin de décider si elle devrait ou pas aller y faire
une tournée. Pas une seule considération pour les droits de l'homme
n'apparait dans cette liste, elle n'y voit que les facteurs
financiers.
La nomination de
Devoy a déclenché beaucoup de débats concernant la question du
racisme. Tellement qu'une des principales émissions télévisées
d'actualité a décidé de consacrer un épisode aux racisme subi
tous les jours par les Maoris. L'expérience filmée suivait le
scénario suivant : un homme d'origine européenne et un homme maori, tous deux
avec le même costume, la même voiture, etc. ont chacun visité les
mêmes stations d'essence pour y demander de faire le plein avant de
payer.
L'homme blanc a pu
faire le plein avant de payer dans les cinq stations d'essence.
L'homme noir a été forcé de payer avant de faire le plein dans
quatre des cinq stations d'essence, malgré son attitude extrêmement
polie. Cette unique petite expérience a donné à tout le monde un
aperçu clair de la discrimination au quotidien qui est subie par les
Maoris et de la faillite des institutions telles que la Commission
des droits de l'homme censées œuvrer à l'élimination du racisme
en Nouvelle-Zélande.
Susan Devoy, la nouvelle Commissaire aux relations inter-raciales, une Kandia Camara néo-zélandaise… |
Les institutions de défense des droits de l'homme
En Nouvelle-Zélande,
le poste de Commissaire aux relations inter-raciales fait partie de
la Commission des droits de l'homme. Cette Commission est censée
défendre les droits de l'homme, consulter les divers groupes
concernés par la défense des droits de l'homme, enquêter dans les
affaires qui touchent aux droits de l'homme, développer un plan
national de promotion et de protection des droits de l'homme, et
participer aux procédures judiciaires liées aux droits de l'homme.
Elle rend compte au premier ministre.
Malgré la présence
de tels organes de défense des droits de l'homme dans la plupart des
pays avancés, les droits de l'homme sont régulièrement bafoués,
chez nous comme ailleurs. Cela est dû essentiellement au fait que
les droits de l'homme sont directement opposés aux intérêts du
capitalisme – un système qui est basé uniquement sur les
profits privés à l'opposé des besoins quotidiens de la population
mondiale.
Sous le capitalisme,
les droits de l'homme sont considérés comme passant après les
droits des capitalistes à faire du profit. De ce fait, le racisme
n'est en fait qu'un sous-produit logique du système de profits.
Comme Malcolm X (militant anticapitaliste et défenseur des
droits de l'homme aux États-Unis, assassiné pour ses idées) le
disait : « On ne peut pas avoir le capitalisme sans le
racisme ». Cela explique pourquoi, lorsque les gouvernements
capitalistes daignent mettre en place de telles institutions, il ne
s'agit en général que de tigres sans dents ni griffes.
Bien que les
socialistes n'accordent pas la moindre confiance en ces institutions,
nous pouvons tout de même utiliser ces institutions, en conjonction
avec des mouvements et des campagnes de masse, en tant qu'outil qui
peut nous aider à obtenir des réformes pour la population opprimée.
Par exemple, un appel aux organes de défense des droits de l'homme
peut être utile pour quelqu'un qui subit la discrimination sur son
lieu de travail là où le rapport de force ne permet pas de vaincre
le patron par une action syndicale.
Les droits de
l'homme, comme tous les droits, ne sont pas quelque chose qui a été
accordé “cadeau” par la classe capitaliste. Tout au long de
l'histoire, il a fallu se battre pour ces droits, et ceux qui ont été
obtenus ne l'ont été que par la lutte. Lorsque la société glisse
vers la crise, nous voyons souvent que les capitalistes cherchent à
reprendre ces libertés démocratiques et ces droits, à faire
reculer l'histoire. On voit ça dans toutes sortes de nouvelles lois
antidémocratiques qui ont été signées ces dernières années. Au
fur et à mesure que s'aggrave la crise économique, nous allons de
plus en plus devoir nous battre pour défendre non seulement notre
niveau de vie, mais aussi nos droits.
Danse guerrière traditionnelle maorie |
L'importance de l'unité de classe
Dans le contexte de
récession et de crise économique mondiale qui ne fait que
s'aggraver, la classe dirigeante va de plus en plus chercher à
diviser la classe des travailleurs afin de l'affaiblir. De son point
de vue, il est beaucoup plus facile de faire payer la crise à la
population, via des coupes budgétaires et des mesures d'austérité,
si cette population est divisée selon des critères de races et
d'ethnie.
Ce que craint le plus
la classe dirigeante, est de voir l'ensemble de la classe des
travailleurs s'unir et agir de concert afin de s'opposer aux attaques
sur notre niveau de vie. Nous ne devons pas laisser des gens comme
Susan Devoy ou John Key utiliser leurs déclarations
publiques afin d'enfoncer des barrières entre les différents
groupes de la population, qui sont tous attaqués.
Les travailleurs, les
chômeurs, les étudiants, et tous les opprimés dans la société,
ont un intérêt commun, qui est celui d'œuvrer tous ensemble pour
nous assurer que ce n'est pas nous qui allons devoir payer la facture
de cette crise économique qui a été causée par les capitalistes.
Nous avons plus en commun les uns avec les autres qu'avec ceux qui
nous exploitent. C'est avec nos syndicats, nos comités de quartier
et des nouveaux partis politiques comme “Mana” que nous devons
lutter pour des emplois, pour des logements et pour des services pour
tous.
En nous organisant
ensemble autour des ces questions de classe, les différences
secondaires telles que la race pourront être mise de côté. Notre
niveau de vie pourra ainsi être protégé et étendu, jetant les
bases pour un nouveau type de société, basé sur la satisfaction
des besoins humains et non pas sur les profits. Ce type de société
utilisera la richesse créée pour fournir à tous tout ce dont ils
ont besoin, et par conséquent relèguera dans les brumes de
l'histoire la discrimination et l'oppression. De véritable droits de
l'homme deviendront une des plus grandes priorités. Voilà le monde
pour lequel luttent les socialistes.
Le nouveau parti “Mana”, au programme de gauche radical, est une bonne initiative pour faire progresser la lutte |
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